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Médias : Rétablir dans sa dignité la profession journalistique

I3lèm el-3âr. Journalisme de la honte. C’est ainsi qu’était désigné le secteur journalistique en Tunisie par ses censeurs légitimes et les autres pour en dénoncer l’asservissement par les autorités en place depuis des décennies. Le même slogan a été repris par les charognards de la « Révolution » dans une tentative de caporalisation de la profession à leur profit. C’est alors que, dans une maladroite tentative de « rachat » et pour lustrer l’image du secteur, on a assisté, par exemple dans le journal télévisé de l’ex « Canal 7 », à l’inversion de l’ordre des priorités du sommaire de chaque édition. Ainsi, on ouvrait le JT par un reportage sur les conditions de vie de Tante X, dans un réduit reculé du pays, reléguant les activités des officiels en pleine période de première transition, y compris celles du chef de l’Etat ou du chef du gouvernement, juste avant l’actualité internationale. Et encore.
Ce n’était pas rien que cela, l’« émancipation » vis-à-vis de l’ancien système. On a aussi adopté un style « décontracté » à la limite de la désinvolture. Dans la mise vestimentaire comme dans le discours. N’a-t-on pas vu un responsable du syndicat des journalistes se rendre en jean’s à une audience avec le chef de l’Etat ? Dans le parler, on a supprimé les « Monsieur » et les « Madame » pour interpeller les interlocuteurs par leur simple prénom. En cela, ils ne sont certainement pas des précurseurs. L’usage d’un tel procédé est en vigueur dans les pays qui sont nos aînés en matière de liberté d’expression. Au point d’apostropher un juge, un officier supérieur, un professeur de médecine, un avocat ou une quelconque autorité dans son domaine par son seul prénom ? Qui plus est souvent par des apprentis journalistes bien plus jeunes et moins bien placés dans leur hiérarchie professionnelle qu’eux ? Certainement pas, même si c’est par pur anticonformisme. A un juge, on dit « Monsieur le Président », à un médecin, « Docteur », à un officier on fait précéder le prénom par le grade — et même s’il s’agit d’un simple soldat ou agent d’un corps armé, on dit « soldat » ou « agent » —, à un avocat, « Maître », etc.

La formation en question
Dans leurs entretiens avec les responsables qui les accueillent dans leurs murs, certains de nos jeunes confrères dans les innombrables chaînes télévisées s’affichent sans complexe dans des postures pour le moins cavalières, accoudés au bureau de leur interlocuteur ou assis les jambes largement écartées. Et ne parlons pas de leur accoutrement vestimentaire.
Il ne s’agit pas ici de se conformer à quelques normes qui, de toute manière, comporteront toujours une part d’arbitraire. Il s’agit fondamentalement de rétablir la profession dans sa dignité qui, elle, comporte une bonne part de respectabilité.
Tout cela devrait couler de source. Mais la source semble tarie depuis longtemps. La distanciation que doit mettre le journaliste entre sa personne et son vis-à-vis n’est pas seulement dictée par une exigence d’objectivation qui mette en relief sa neutralité mais aussi pour maintenir, au sein de l’opinion publique, le nécessaire respect des institutions. Il est évident que ces « anomalies » trouvent leur origine dans des carences au niveau de la formation. Mais la formation ne doit pas s’arrêter aux seules années d’études supérieures. Normalement, elle doit se poursuivre par l’encadrement des aînés (les chefs hiérarchiques) au sein des entreprises. Car la détention du seul diplôme ne saurait équivaloir à la possession du métier. Ici comme ailleurs, il y a une dimension « artisanale », c’est-à-dire pratique, à travers les exercices rédactionnels mais aussi à travers une éducation comportementale dans l’exercice quotidien de ce métier. Elle seule peut vraiment donner accès à la dignité de la profession journalistique.
A la veille de rudes joutes électorales au cours desquelles le journaliste est appelé à jouer un rôle crucial dans la transmission de l’information et dans la formation d’une opinion parmi le public, il est important que ce « médiateur », à travers la qualité de son travail mais aussi de sa propre présentation, donne de lui-même la meilleure image possible.
Tahar AYACHI

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